Balade d'agrément

Je comprends...

Oui, je comprennais. Mais cela ne signifiait pas non plus que j'approuvais totalement ce qu'elle disait. Je n'étais peut-être pas parfait, mais j'estimais que par rapport à d'autre personne, je m'approchais pas à pas de la perfection. Et ce n'était pas du narcissisme juste la stricte vérité. Néanmoins, je n'avais pas vraiment la tête à penser à ce genre de chose maintenant qu'elle s'était rapprochée de moi.

Encore troublé par sa réaction de tout à l'heure, je n'esquissais aucun geste vers elle, me contentant de la laisser faire. Elle toucha ma joue alors qu'elle m'assurait qu'elle ne les laisserait pas faire. J'avais du mal à le croire mais pour aujourd'hui seulement, je voulais espérer qu'elle dise la vérité. Si c'est elle qui nous défendait tant mieux. Mais si elle n'y arrivait pas, ou qu'elle ne le faisait pas, au final je serais toujours là pour le faire à ma manière.

Je n'ai plus qu'à te faire confiance alors.

Lorsqu'elle s'appuya contre moi, j'osais enfin bouger pour la prendre dans mes bras. Rien de possesif comme à mon habitude. Je voulais juste la tenir contre mon torse pour ressentir sa présence. C'était une chose qui n'était plus arriver depuis tellement longtemps...

Il comprenait. C'était la meilleure des choses ! Il comprenait ce que je voulais dire. J'espérais qu'il continuerait à comprendre et qu'il ne réagirait plus de manière si fière ! Moi aussi, j'avais ma fierté, mais je la laissais parfois tomber - souvent à vrai dire, parce que mes erreurs étaient nombreuses - pour m'excuser. C'était la moindre des choses lorsqu'on se trompait.

Je fus soulagée aussi par le fait qu'il me dit qu'il n'avait plus qu'à me faire confiance. J'eus un élan de réconfort en en déduisant qu'il ne menacerait plus de tuer mon frère, mon père, Lucas ou toute autre personne qui m'était proche ! S'il me faisait confiance, ça ne pouvait dire que cela, selon moi ! Il me laissait gérer la situation, même si j'essayais déjà de les convaincre depuis des années sans succès...

Je préfère ça. Je préfère que tu me fasses confiance, comme avant ! Comme quand nous étions enfants...

Ses bras se serrèrent autour de moi, et la chaleur de son corps se fit plus présence, plus réconfortante. Comment avais-je pu penser un instant à le détester, lui, cet être à qui appartenait mon cœur ? Je ne pouvais que l'aimer, aucun autre sentiment n'était possible !!

C'est fou ce qu'elle pouvait rester focaliser sur le passé. Le temps de l'enfance était passer depuis bien longtemps et il ne referait jamais son apparition. Et surtout, celui que j'étais avant n'existait plus, bien heureusement. Néanmoins, vu que face à ce Jonathan là, elle se sentait bien, il valait peut-être mieux que je fasse un effort pour le redevenir de temps en temps devant elle. Ou du moins, faire semblant de redevenir gentil.

Alors j'essayerais de ne plus oublier cela...

J'aimais tellement l'avoir comme contre moi. Cela changeait vraiment qu'elle accepte réellement d'être dans mes bras plutôt qu'elle se sente forcée ou qu'elle soit réellement obligée. Des fois, j'en venais à me demander si je faisais le bon choix avec Laena. Etais-ce réellement la meilleure solution de la vouloir sous ma coupe?

Tu veux bien que l'on rentre chez nous maintenant..? L'endroit n'est pas vraiment agréable et tu as l'air de t'être fait mal...

Avec tout cela, je ne savais plus trop ce que je pouvais faire et ce que je ne pouvais pas faire. Aussi je préférais prendre des pincettes en lui demandant son avis avant de faire les choses.

Ses paroles étaient si réconfortantes ! Et la façon dont il me serrait contre lui l'était tout autant. Je me sentais bien, en ce moment, avec lui. Malgré tout ce qu'il s'était passé avant. N'était-ce pas en effet le lot de tous les couples, les petites disputes ? C'était normal, après tout. Nous ne pouvions pas être toujours d'accords sur les mêmes choses ! Il y avait des différends, et c'était ça qui pouvait nous rapprocher. Ça ne devait pas nous éloigner...

- Tu veux bien que l'on rentre chez nous maintenant..? L'endroit n'est pas vraiment agréable et tu as l'air de t'être fait mal..

Ce "chez nous" me fit un effet assez paradoxale : d'un côté, j'étais heureuse d'entendre cela, de savoir que nous avions un "chez nous", mais en même temps cet endroit ne m'attirait pas réellement, surtout après y avoir été enfermée durant un assez long moment... Je ne voulais pas me retrouver seule encore une fois dans cette chambre si froide et si impersonnelle...

Je veux bien rentrer, mais à une condition !

Je m'écartai légèrement de lui pour lever la tête afin de croiser à nouveau son regard.

Ne m'enferme plus, s'il te plait. Je déteste ça ! Tu n'es pas obligé de me garder en cage pour les empêcher de m'enlever à toi...

Par chance, elle sembla d'accord de rentrer mais sa condition m'effraya durant un court instant. Et si elle me demandait une nouvelle fois pour rentrer chez son père? Je ne voulais pas que nous retournions dans ce cercle vicieux maintenant que nous en étions enfin sortit! Par chance, elle me demanda une chose que je pouvais accepter. Oui, puis-ce qu'elle me promettait de nous défendre face aux autres, je pouvais la laisser plus libre dans le château. De toute façon, je savais tout ce qui passait dans le bâtiment donc, je ne prenais pas de gros risque en acceptant.

J'accepte de te laisser cette liberté... Mais me promais-tu de ne pas me trahir? Tu ne disparaîtras pas parce qu'il n'y a plus de barreaux hein?

Je posais doucement mon front sur le sien et toisais son regard bleu pour être sûr de pouvoir y lire ce que je désirais. Je voulais qu'elle me le promette les yeux dans les yeux. Et puis, je ne me lassais pas de contempler cet immense océan où j'aurais adorer me noyé.

Comme ça c'est toi qui viendra à ma rencontre... plaisantais-je gentillement.

Il acceptait de me laisser plus de liberté ! C'était un immense pas en avant ! Je me sentais déjà plus libre rien que d'y penser !! Ne plus être cloitrée entre quatre murs, avoir la possibilité de me balader, de me dégourdir les jambes et de voir des gens, c'était important pour moi.
Il posa son front contre le mien sans quitter mon regard. J'acquiesçai très légèrement de la tête, mais mes yeux parlaient pour moi. Pourtant, je voulais le lui assurer par la parole, pour qu'il soit rassuré.

C'était ces barreaux qui me donnaient envie de m'enfuir... Je ne te trahirai pas, je t'aime trop pour ça !

Perdue dans le profonde nuit noire de ses yeux, je ne pouvais que lui promettre de ne pas le trahir, de rester avec lui.
Sa plaisanterie me fit sourire. Enfin, ce n'était pas tout à fait une plaisanterie. De cette manière, il était vrai que je pourrais aller à sa rencontre, sans devoir attendre sans cesse ses visites, ou les redouter...

Nous ferons chacun la moitié du chemin.

Vu sous cet angle, la contrainte était définitivement à exclure. S'il suffisait pour qu'elle marche à mes côtés que je lui laisse une certaine liberté alors je prendrais sur moi et je la laisserais faire ce qu'elle désire. Dans la mesure du raisonnable bien entendu.

Moi aussi je t'aime trop... soufflais-je seulement, le reste n'ayant pas d'importance.

Elle était de nouveau là ma Laena. Douce, gentille et affectueuse. C'est comme ça que je l'aimais vraiment et aucun cas je ne voulais qu'elle change. Surtout à cause de mes actes qui je devais l'admettre n'étaient pas toujours très fins.

Oui c'est une excellente idée. Nous conserverons cette façon de vivre, je crois que c'est ce qui est le mieux. Mais il faudra que nous fassions quelque chose pour ta chambre. Elle est trop triste et on y voit la vie en gris. C'est désespérant je trouve. Pas toi?

-Moi aussi je t'aime trop...

Ces mots soufflés par Jonathan étaient une douce mélodie que j'aurais aimé entendre plus souvent. Plus souvent dans ce genre de conditions, plutôt. Parce qu'il ne manquait jamais une occasion de me faire savoir qu'il m'aimait, mais ce n'était pas toujours de la manière la plus appropriée...

Il me parla alors de refaire ma chambre ! Lui aussi la trouvait trop triste, trop terne !! Je hochai la tête : oui, c'était désespérant. Je m'étais souvent crue emprisonnée entre ces quatre murs pour toujours...

Si, je suis tout à fait d'accord avec toi !

En réalité, je le lui avais déjà dit, mais il n'avait pas semblé m'écouter à ce moment-là. Tant pis, le plus important était qu'il me le proposait enfin. Mieux valait tard que jamais, non ?
Je sentis à nouveau les fourmis qui parcouraient plus tôt ma jambe. En fait, elles ne m'avaient pas quittées, mais je n'y faisais plus attention jusqu'à ce moment-là.

Rentrons, alors...

Ma proposition sembla lui plaire ce qui m'enchanta. Encore une fois, nous étions d'accord et c'était tant mieux! Je la lâchais et passais simplement mon bras autours de ses épaules pour la tenir contre moi. C'était plus efficace pour marcher mais au moins, je ne devais pas quitter ma chère Laena.

- Et qu'est-ce qui te plairait? Tu as déjà des idées de couleur ou d'objets que tu désires y installer?

Je portais mes doigts à mes lèvres et sifflais mon cheval. Celui-ci nous rejoint rapidement et s'arrêta calmement à nos côtés, son étrier pile devant Laena. C'est qu'il était bien dresser au moins celui-là. J'aurais vraiment du mal à m'en séparer pour une broutille.

- Ca ira pour monter ou tu veux un coup de main?

Nous allions bien devoir partager une monture puis-ce qu'elle n'avait plus la sienne. Enfin ce n'était pas comme si c'était vraiment dérangeant.

Il me lâcha mais laissa tout de même un bras autour de mes épaules avant de me demander ce qui pourrait me plaire. En fait, je n'y avais jamais vraiment réfléchi. Je ne savais pas ce que je voulais voir dans cette chambre si grise et terne.

Eh bien... Du bleu ou du violet. J'y verrais bien des fleurs, aussi, pour apporter de la fraicheur à la pièce. Et une fenêtre que je pourrais ouvrir quand j'en aurais envie !

Pour l'instant, je ne voyais pas ce que je pouvais vouloir de plus. Il faudrait y réfléchir plus longuement et voir en conséquence.
Il siffla son cheval qui accourut aussitôt pour se placer devant moi. Il était vrai que je n'avais plus de monture... Je m'en voulais un peu d'avoir réagi de cette façon, parce que j'avais causé la mort d'un être innocent, qui ne faisait qu'obéir à mes ordres...

Je veux bien que tu m'aides.

J'avais pensé refuser, mais je ne voulais pas risquer de l'irriter. Et puis, j'avais mal à la jambe, alors son aide n'était pas inutile.

Pour le moment, ses envies me semblaient relativement raisonnables. Elle ne demandait pas grand chose, ainsi l'installation de sa chambre irait vite ce qui nous permettrait de penser à autre chose. Quoi que passer une journée à décorer pouvait être amusant. En fait, tout était agréable si elle se tenait près de moi.

- Du bleu ou du violet? Ce ne sont pas des couleurs un peu froide? Enfin, c'est comme tu veux si c'est ce que tu désires alors nous ferons cela.

Personnelement, j'aurais plus vu un rouge flamboyant ou du moins une couleur plus vive. Mais la gamme des rouges ne semblaient plus être à son goût ces derniers temps, lui rappelant peut-être le côté sanglant de cette teinte. Bon, nous allions donc éliminer immédiatement le rouge de la liste pour ne plus en parler alors.

Pour mon plus grand plaisir, elle accepta mon aide pour grimper sur le cheval que nous allions partager. Je la portais donc sans mal jusqu'à la selle et une fois qu'elle fut bien installée, je montais à mon tour. Passant mes bras autours de sa taille pour tenir les rennes, je posais délicatement mon menton sur son épaule pour plus de confort. Avant de démarrer, je collais un baiser sur sa joue blanche pour ensuite faire trottiner l'animal. Nous ne devions pas nous presser et c'était tant mieux.

- Pour la fenêtre, c'est une excellente idée. Que tu t'oxygènes plus souvent te feras du bien...

Jonathan acceptait de faire comme je le voulais, ce qui n'allait pas pour me déplaire ! Il était rare qu'il écoute mes demandes, et encore bien plus rare qu'il y réponde !

Je ne sais pas pourquoi, mais aucune autre couleur ne m'attire vraiment. Ou alors, peut-être du crème ou de l'écru, je ne sais pas !

En tout cas, ce qui était certain, c'était que je ne voulais absolument pas du rouge ! J'en ferais d'atroces cauchemars, j'en étais sûre ! Non, ça me rappellerait trop le sang qui maculait mes mains...
En parfait gentleman, il m'aida à monter sur son cheval et s'installa ensuite derrière moi. Passant ses bras autour de ma taille, il prit les rennes et posa son menton sur mon épaule. Un baiser vint se coller sur ma joue avant que l'animal ne commence à avancer.

Tu as raison...

C'était ce que je me tuais à lui dire depuis des années, mais il venait enfin de le décréter ! J'avais besoin d'oxygène, de respirer un peu, de ne pas être tout le temps enfermée. Malgré notre petite altercation de tout à l'heure, je pouvais finalement dire que c'était une bonne journée.

Au fait, quelle était cette surprise ? Tu peux bien me le dire, maintenant !

Bien sûr que j'avais raison, je n'en avais jamais douter contrairement à elle. Mais ce n'était vraiment pas l'instant pour revenir à des stupidités qui auraient pu tourner en dispute, chose que je voulais éviter pour le moment. Néanmoins, même si j'acceptais à peu près tout ce qu'elle me demandait, il allait quand même falloir que je mette en place une surveillance discrète pour être sûr qu'elle ne se laisse pas tenter par l'idée de partir gambader un peu trop loin du palais.

Elle remit alors cette histoire de surprise sur le tapis ce qui me surprit grandement. Elle n'avait donc pas oublier que je lui avais promis quelque chose dont elle se souviendrait longtemps! Mon idée était bien tout à l'heure mais elle n'avait désormais plus sa place. Qu'allais-je donc pouvoir lui raconter pour qu'elle évite de me poser trop de question?!

- C'est un cadeau pour toi...

Bon ce n'était pas ce qu'il y avait de mieux pour éviter les interrogations mais au moins je m'éloignais de l'épineux sujet que je ne voulais pas aborder. Il fallait qu'elle se focalise sur un objet ou une chose, plutôt que sur l'idée d'un acte barbare et destructeur qui l'aurait marquée à vie et qui peut-être l'aurait pousser à obéir un peu plus souvent.

Il eut comme un instant de réflexion à ma dernière question. J'attendis qu'il me réponde, me demandant pourquoi il hésitait tant.

Un cadeau ? Vraiment ?

Je me demandais réellement ce que cela pouvait être. Et avions-nous besoin de partir si loin pour un simple cadeau ? Cependant, mon enthousiasme redescendit bien vite, aussi vite qu'il était apparu à vrai dire. Après tout, n'avait-il pas qualifié de "cadeau" l'apparition de ma mère, le jour de nos fiançailles ? Et si c'était encore quelque chose de ce genre ? Je ne voulais pas y croire ! Mais je ne pouvais faire autrement que de m'en inquiéter...

Quel genre de cadeau ? l'interrogeai-je, peu sûre de moi.

Son comportement changea totalement lorsque je lui parlais du fameux cadeau. Dans sa voix résonnait déjà une certaine appréhension qui me fit me poser des questions. Qu'avais-je fait? Pourquoi réagissait-elle de cette façon? Et puis, les souvenirs aidant, je me rendis compte que le dernier présent que je lui avais offert n'était autre que la mort de sa mère. Je n'aurais jamais imaginer qu'elle associe les deux choses, même si au fond elle avait tout à fait raison de se méfier. Enfin plus maintenant...

Un chouette cadeau... Pas le genre pomme empoisonnée dans laquelle on est forcer de croquer. Je pense que c'est quelque chose qui te fera plaisir même si ce n'est qu'un bien matériel.

C'était bien gentil de dire ça mais, le bien matériel j'allais devoir le dénicher. Qu'est-ce qui aurait bien pu lui faire plaisir? Bien sûr je savais ce qu'elle désirait mais ce n'était pas un bien matériel et puis, c'était trop pour un petit cadeau.

Tu découvriras bientôt de quoi il s'agit, je ne te ferais plus patienter plus longtemps...

Pour me rassurer, il m'affirma que ce n'était pas un cadeau empoisonné. Pas comme la dernière fois. Il disait que ça me ferait plaisir ! S'il en était si sûr, je voulais bien le croire.

J'ai hâte de le voir, alors. Je me demande ce que c'est !

Il m'assura que je découvrirai bientôt de quoi il s'agissait. Sûrement lorsque nous serions rentrés. Mais alors, pourquoi avoir fait tout ce chemin ? J'avais du mal à comprendre... Quelque chose ne collait pas dans ce qu'il disait et dans ce qu'il faisait. Était-ce moi qui cherchait trop loin ? Ou avais-je raison, pour une fois ?

Je posai ma main gauche sur la sienne, qui tenait les rennes. Nos deux alliances brillaient du même éclat. Je les observai un long moment en silence. Si cela ne s'était pas déroulé dans ces circonstances, je n'aurais jamais regretté d'être mariée avec lui. En ce moment, cela me plaisait, mais seulement parce qu'il était redevenu le Jonathan que je connaissais. Un peu plus adulte, certes, mais c'était bien lui. Il n'était pas cet homme qui m'était tout bonnement inconnu... Étais-je en train de rêver ? Ou avais-je rêvé tout cela ? Je préférais penser que la deuxième était la bonne.