Insignifiant...

Comme je l’avais redouté, ma question fini de désarçonner la princesse.
Elle commença à se confier, hésitant quelque peu à chaque parole. Alors ils s’étaient rencontrés si jeune ?
Elle m’expliqua comment il l’avait séduite, avec des rêves plus beaux les uns que les autres.
Elle me lâcha les mains pour s’entourer de ses bras, comme si elle serrait contre elle un doux songe, ou comme si elle cherchait à se protéger de quelque chose.
Il avait su être là au moment où elle en avait besoin. Mais je redoutais que cela ne soit qu’un monté. Jo était très intelligent, et le fait qu’il ait préparé une attaque quelconque depuis sa plus tendre enfance ne m’étonnait pas le moins du monde.
Comme j’aurais voulu être là moi aussi.
Apparemment, elle n’a jamais supporté la vie de princesse et tout ce que cela imposait.
Déjà enfant elle rêvait d’aventure…
Des larmes se mirent à coulée le long de ses joues, mais je remarquais qu’elle essayait de les retenir.
Je me levais tout en la faisant se levée également et je la pris contre moi de mon bras ‘intacte’, lui disant qu’elle ne devait pas avoir honte de pleurer. Je comprenais mieux maintenant. Jo l’a aidé lorsqu’elle en avait besoin. Qui ne succomberait pas à cela ? Il avait tout calculé, depuis le début. C’était la seule chose qui me paraissait évidente, bien que je n’en aie aucune confirmation…
Je gardais le silence un moment, la laissant confier ses sentiments, bien qu’elle ne dise plus rien.
Après un moment, je me risquais à parler.

« Tu n’es pas seule Laena. Des gens t’aiment et ne demande qu’à t’aider, si tu veux bien les laisser faire. »

Je la relâchais un peu pour pouvoir la regarder.

« Arrête de rejeter toutes les fautes sur toi, laisse nous t’aidé à porter ton fardeaux.
Tu n’es pas seule ! Je sais que tu es forte, tu n’as pas besoin de me le prouver, ni à qui que se soit d’autre.»

Je me répétais, mais je voulais qu’elle comprenne. Qu’elle se sente seule m’attristait. Je ne m’en étais jamais vraiment rendu compte, ni personne d’ailleurs.
Personne, sauf Jonathan, et il en avait bien profité le chien !
Je la repris dans mes bras, gardant à nouveau le silence. J’étais dure, et je m’en voulais de lui faire du mal. Mais c’était pour son bien. Ca fait mal sur le coup mais sa soulage après.
Il fallait qu’elle arrête de se sous estimer et de rejeter toute les fautes sur elle.
Elle avait du souffrir, et elle souffrait encore. Et je voulais l’apaisé de ses souffrances qui la rongeaient. Mais je me sentais inutile face à son désarroi. J’espérais avec doute qu’elle entende mes paroles.

Alors que j'avais fini par craquer sous la pression des larmes, Lucas passa son bras valide autour de mes épaules et me serra contre lui. Ce contact, même si j'aurais voulu refuser de le dire, me faisait du bien. Inconsciement, étrangement. Je me sentais déjà un peu moins... seule ? comme ça, avec lui qui se manifestait de cette façon.

Et puis, ses paroles allèrent dans ce sens elles aussi. Il me jura que je n'étais point seule, qu'ils étaient tous là pour moi si j'en avais besoin, que je devrais arrêter de les repousser et de garder ces fautes pour moi au lieu de leur permettre de m'aider... Etait-ce si facile ? Non ! Il ne savait rien, et pourtant...

Il ne savait rien, il ne me connaissait pas assez. Nous nous étions rencontrés il y a peu, et pourtant, presque comme avec Jo, c'était comme si un lien nous unissait l'un à l'autre. Pas de la même façon que ce lien avec mon fiancé, un lien différent nous reliait, je n'aurais su le décrire. Parfois, j'avais l'impression d'être une vulgaire poupée manipulée par des ficelles et dont l'histoire était déjà toute tracée durant le spectacle auquel elle se livrait. Quelqu'un dirait le contraire ? Personne, car ce n'était, à vrai dire, pas tout à fait faux...

Je ne savais pas que lui répondre. Oui ? Non ? Peut-être ? Aucune de ces solutions ne me venaient à l'esprit. J'aurais voulu ne plus avoir à penser, ne plus être forcée de réfléchir aux solutions des problèmes dans lesquels j'étais tombée. Piégée, ou piégeuse ! Où se trouvait la vérité ici ? Avais-je enfoncé la lame de mon propre chef ou m'étais-je faite manipulée ? J'étais consciente d'être inconsciente, et pourtant, des images se glissaient inopinément dans les méandres de mon esprit, afin de me troubler plus encore, à chaque instant.

Dans ce monde, où était le mal ? Le bien existait-il ou était un mirage, une illusion inventée de toute pièce par certains pour en enfermer d'autres dans une pseudo paix intérieure qui n'existerait pas ? Une paix arnachée à des coeurs qui ne pouvaient la reccueillir et la nourrir, la faire grandir, ou simplement la loger en leur sein ! Où allions-nous... Quel chemin prendre ? Qui croire ? Est-ce que quelqu'un pouvait réellement entendre mes doutes, comprendre mes peurs, habiter ma solitude ... ?

Lucas... Nous devons rentrer...

Ce fut la seule phrase que je pus dire. Je ne pouvais m'ôter toutes ces réflexions de la tête et elles s'emparaient de chacune de mes pensées, monopolisant l'espace qui m'était presque vital. J'étais perdue en essayant de me retrouver...

Il y eu un long moment de silence, seulement troublé par les sanglots retenus de la princesse.
Je ne bougeais pas, attendant qu’elle se calme et réagisse.
Elle était totalement troublée. J’aurais voulu lire dans ses pensées en ce moment précis, comprendre se qu’elle ressentait.
Au bout d’un long moment immobile, Laena prononça afin quelques mots. Elle voulait rentrer. Cela me soulagea. Mais je ne savais comment faire pour quitter le château.
La princesse était à bout et moi, à bout de force.
Je manquais cruellement d’énergie, et je ne me sentais pas du tout de taille face à Jonathan, ni même face à Nicolas.
Je relâchai doucement Laena et me tournais vers la porte. Elle ne devrait pas opposée trop de résistance, du moins si l’endroit n’était pas ensorcelé, ce qui ne m’étonnerait pas.
J’essayais de réfléchir, mais toutes les idées qui me traversaient l’esprit me semblaient impossibles.
Comment pourrions-nous nous échapper d’ici ? Je regardais un moment la princesse avant de me diriger vers la porte. Je donnais un coup d’épaule dedans et me mordit les lèvres pour ne pas laisser paraître la douleur.
Je donnais ensuite un coup de pied. Je devais au moins essayer de faire céder la porte, faute de mieux…
Je pris sur moi pour taper le plus fort possible, c'est-à-dire pas très fort…
Pourtant, la porte céda après quelques coups. J’en restais figé un moment. C’était trop simple…Mais je ne posais pas plus de question. Vu notre situation, agir sur le coup était la seule solution possible.
Je rejoignis la princesse en vitesse et m’arrêtai un moment face à elle.
J’essuyais doucement ses larmes avant de lui prendre la main.

« On rentre. »

Je la tirais légèrement afin de la presser. Il fallait être discret. J’espérais que l’événement qui avait poussé Nicolas à interrompre le prince soit assez important pour les retenir encore.
Il n’y avait personne dans le couloir. Ce n’était pas normal. J’allais voire jusqu’au tournant avant de faire signe à la princesse que la voix était libre. Il faisait bien trop calme. Nous devions être plus que prudents.
J’interrogeais Laena du regard sur le chemin à prendre. Je ne savais même pas s’il fallait monter ou descendre… J’espérais qu’elle connaisse mieux l’endroit, mais j’avais un doute…

Lorsqu'il me lâcha, il se tourna vers la porte. Il devait avoir une idée en tête, et je ne l'empêchai pas de la réaliser alors qu'il frappait dans le bois pour tenter de le faire céder. De toute façon, j'en aurais été bien incapable ! Et puis, je savais qu'il n'y parviendrait pas pour avoir déjà été enfermée ici auparavent. Il n'y avait pas si longtemps, d'ailleurs.

Pourtant, contre toute attente, la porte céda après plusieurs essais de sa part ! D'abord, je crus voir un mirage, une hallucination. Mais peu à peu, je compris que cela ne l'était pas ! Surtout lorsqu'il me prit la main pour me tirer hors de la chambre avec lui, dans le couloir.

Nous avançâmes de quelques pas avant qu'il ne m'interroge du regard, attendant sans doute à ce que je lui dise par où aller. Cependant, j'en étais bien incapable...

Je ne sais même pas où nous sommes. Cet endroit m'est totalement inconnu.. Je suis désolée, Lucas !

J'avais beau regarder les oeuvres d'art accrochées aux murs, les tapis et les soieries riches en couleurs, rien ne m'était familier !

Je ne sais même pas comment nous avons atterri ici... Si au moins nous avions parcouru ces couloirs, peut-être aurai-je pu me souvenir du chemin que nous aurions alors pris !

Laena me répondit qu’elle n’avait aucunes idées de l’endroit où nous nous trouvions.
Elle ne savait même pas comment nous avions atterrit ici. De ce que je m’en souvenais, nous n’avions pas été amenés dans cette chambre de façon ‘naturel’…
Je réfléchis encore un moment. La porte qui cède, les couloirs vides…quel piège nous avaient-ils tendu cette fois ?
Enfin, de toute façon, rester sur place à attendre ne nous avancerait pas beaucoup. Alors autant essayer de sortir…
Un nouveau coup d’œil, et je m’engageais sur la gauche, tenant toujours Laena par la main afin d’être sur de ne pas la perdre.
Nous avancions prudemment, et je vérifiais à chaque tournant s’il n’y avait personne.
Cela me semblait de plus en plus bizarre. Pourquoi est-ce que le palais était vide ? Mais est-ce que nous étions seulement à Monäre ?
J’avais l’impression de tourner en rond. Mais où étions-nous à la fin ?!
Après ce qui me sembla une éternité, nous finîmes par tomber sur une porte. Il n’y avait personne pour la gardée…une fois de plus.
J’y collais l’oreille afin d’écouter ce qu’il se passait de l’autre coter.
C’était le silence total. A croire que l’endroit était totalement abandonné…
Evidement, un bruit de pas vint contredire mes espoirs. Miracle, il y avait quelqu’un.
Mais je ne m’attardais pas pour savoir s’ils étaient vivants ou mort…car c’est ce que je redoutais vu le silence…
J’essayais d’ouvrir la porte, qui n’opposa aucune résistance, et y poussais doucement la princesse après avoir vérifié que la voie était libre. Je la suivis et refermais doucement derrière moi. Juste à temps, car j’entendis les pas de l’autre côté, où nous nous trouvions il y à quelques seconde à peine.
Je soupirais de soulagement et me retournais pour me retrouver face aux cachots. Un frisson me parcouru. Retour au point de départ…
Je me tournais à nouveau vers Laena.

« Désolé, mauvaise porte… »

Et nous étions coincés. Au moins, nous savions que nous n’étions pas seuls…
Quoique le contraire m’aurait bien plu. ON avait l’air bien maintenant…

Les couloirs se succédèrent les uns après les autres, se ressemblant tous pour moi. Je n'arrivais pas à m'y retrouver. D'ailleurs, je n'avais jamais réussi à me promener dans les couloirs, et ce, pour deux raisons : la première était que je m'y perdrais sans cesse, la seconde que Jo veillait à ne pas me laisser seule pour ce genre d'entreprise. Il était soit prévenant, soit un peu trop possessif.

J'entendis le bruit en même temps que Lucas. Je ne pus m'empêcher de m'arrêter à l'instant où il parvint à mes oreilles, frappée de stupeur. Mais Lucas ne s'arrêta pas et me tira jusqu'à une porte qu'il referma aussitôt derrière nous. Cependant, malgré notre sauvetage in-extremis, l'endroit où nous avions atterri n'en était pas moins infréquentable. Nous venions de pénétrer dans l'entrée des cachots et, bien que je ne m'y sois jamais rendue de cette manière -seulement en compagnie de Jo, et par un raccourci-, je le sus de suite.

Ce... ce n'est rien... Il n'y avait pas d'autres alternatives.

Pourtant, il restait un doute : même moi, je pouvais me rendre compte que ce n'était pas tout à fait normal. Pourquoi n'y avait-il personne dans les couloirs ? Pourquoi tout était-il vide ? C'était tellement étrange...

Que fait-on ? Tu crois que le passage va se libérer ?

Je doutais moi-même de ma question, et pourtant j'espérais.
Soudain, un appel assez déchirant se fit entendre du fond des cachots. Cela m'intrigua et m'effraya en même temps. Ce cri n'était plus humain, mais il implorait. Il implorait l'aide que quelqu'un pourrait lui apporter. Abréger ses souffrances ? Ou le libérer ? Nous aussi étions coincés ici, mais pas dans la même situation que lui...

Mue par un sentiment qui s'apparentait fort à une sorte de pitié, je quittai Lucas et m'avançai presque automatiquement le long du couloir délabré. Dans chaque cellule se trouvait un ou plusieurs prisonniers. Certains fonçaient dans leur barreau, passant leur bras au travers pour essayer de me frôler, implorant mon aide ; d'autres ne bougeaient même plus, morts ou presque.
Je m'éloignais avec stupeur, étant triste de ce recul par rapport à ces pauvres gens. Mais j'avais l'impression de devoir me dépêcher.

Au fond, il y avait une lourde porte. Le souffle court et d'une main hésitante, je la poussai doucement, avec appréhension. Devant moi, je découvris alors un soldat en train de brûler au fer rouge un jeune garçon d'une quinzaine d'années. Ce dernier, à force de se voir écorcher par la peau, se mettait à hurler sans même s'en rendre compte. Toute sa souffrance se transmettait par ce cri si déchirant, transperçant jusqu'au coeur des autres prisonniers.

Je restai un instant pétrifiée devant cet affreux spectacle, avant de réussir avec peine à réagir. Je m'avançai d'un pas tremblant vers eux.

Arrêtez, vous ne voyez pas qu'il a mal ?

Laena semblait elle aussi dérangée par le calme étrange qui régnait dans le château.
Elle me demanda ce que nous pouvions faire maintenant, et si le passage allait se libéré.
Je haussais les épaules en signe d’ignorance. Nous étions dans une impasse, et j’hésitais à sortir de nouveau dans les couloirs.
Soudain, une plainte à fendre le cœur résonna dans les cachots.
Laena réagit aussitôt et s’éloigna de moi pour suivre le cri. Je voulu la retenir mais je m’abstins d’intervenir, voyant que cela n’arrangerait rien vu la façon dont elle avançait.
Je la rejoignis tout en évitant de croiser le regard des prisonniers qui se ruaient vers nous, nous implorant de les libérer. Lorsque nous arrivâmes à une porte, je fus retenu avec force par l’un des prisonniers. Essayant de me dégager, je ne pu empêcher Laena d’ouvrir doucement la porte. Ce qui se trouvait derrière me figea un moment. Les hurlements du garçon étaient horribles, et cette vision me rappela une autre scène qui me donna envie d’égorger vif le bourreau. Mais je me retins et attrapait Laena par le bras pour la faire reculée. Trop tard, le soldat avait remarqué notre présence. Il abandonna sa victime en pleure et se tourna vers nous avec un regard mi-étonné, mi-sadique.

« Tient tient, du sang frais. »

Sans réfléchir, il se rua sur Laena, le fer chauffé à blanc serrer dans sa main.
Par reflexe, je me mis entre les deux et lui envoyais un coup de pied dans les côtes, enchainant par un coup sur le poignet afin qu’il lâche le fer.
Le soldat, qui semblait avoir une intelligence restreinte, essaya de me donner un coup de poing que j’évitais sans mal. Avait-il bu ?
Profitant de sa perte d’équilibre, je lui assénais un coup sur la nuque afin de l’assommer. Cette ‘bagarre’ fus suffisante pour réveiller la douleur de mon bras, mais je n’en laissais rien paraitre.
Je ramassais le fer et regardais e garçon qui nous fixait avec un regard effrayé. J’envoyais l’instrument à l’autre bout de la pièce et m’approchais doucement du jeune garçon, tentant de la rassurer en lui disant qu’il ne risquait plus rien. Mais cela ne semblait pas l’apaiser.
Je me tournais vers la princesse, signe que je lui laissais la place. Elle aurait surement plus de chance que moi. Je reculais légèrement et me mis de façon à avoir le garde en ligne de vue, au cas où il lui viendrait l’idée de se réveiller. Le garçon était dans un sale état. Plusieurs brûlures étaient disséminées sur tout son corps frêle. J’étais dégouter. Comment pouvait-on s’en prendre ainsi à des innocents ?

Je n'avais pas réellement réfléchi aux conséquences directes de mes actes. Je n'avais pas pensé qu'il se serait retourné de cette façon contre nous. Je ne m'y étais pas vraiment attendue, à vrai dire.
Heureusement que Lucas était plus attentif que moi et qu'il m'éloigna du fer pointé sur moi avant que ce dernier n'eusse touché ma peau. Cette fois-ci, on pouvait le dire, j'avais eu chaud.
Il en profita pour le mettre hors d'état de nuire, du moins pour l'instant, ce qui était déjà pas mal. Il s'approcha ensuite du pauvre enfant, qui refusa cependant de le laisser trop approcher. Il se tourna alors vers moi, comme pour me reléguer la tâche de le calmer. Je ne savais pas si j'y arriverais... Mais je voulais essayer !

Je dépassai donc Lucas et m'approchai doucement de l'enfant, qui en réalité ne paraissait, en apparence, pas bien plus jeune que moi. Je m'en sentais d'autant plus proche, ce qui me poussait à faire de mon mieux. Et, de toute façon, je l'aurais fait si cela avait pu le sauver !!

Ne t'en fais pas, nous ne te voulons aucun mal, lui dis-je en essayant de sourire, geste difficile devant les horreurs qu'on lui avait infligées.

Je réussis à m'approcher suffisamment de lui pour détacher les lanières de cuir qui lui maintenaient les poignets et les chevilles à une table en forme de X. Il ne broncha d'abord pas, avant de se jeter littéralement à mon cou, m'enlaçant assez fortement. Il devait être soulagé de ne plus être sous l'emprise de son bourreau. J'avais par contre l'impression que s'il continuait de me serrer ainsi, il allait briser mes os. Cependant, je n'osai rien dire, de peur de lui ôter ses minutes de délivrance. Il paraissait si jeune, le pauvre ! Je pouvais même ressentir ses blessures encore chaudes et sanginolantes, ce qui achèverait de tacher ma robe, et ma peau. Il avait dû réellement souffrir entre les mains de cette ignoble créature !

Laena réussit à s’approcher suffisamment du garçon pour pouvoir le détacher. Ce fût à peine chose faite qu’il se jeta à son cou. Il semblait soulagé d’être débarrasser de ses liens et du soldat, ce qui était tout à fait normale, mais ce n’était pas une raison pour étouffer la princesse…
Laena resta sans bouger un instant, mais nous ne devions pas nous attarder ici. Le garde tenta de se relever mais je fus plus rapide que lui. Il se prit un nouveau coup dans le dos, qui l’assomma à nouveau.

« Laena, il faut partir. Nous devons trouver un moyen de sortir d’ici. »

Evidement, il était hors de question de laisser le garçon ici. Cela ne nous aidait en rien…
Je trainais le garde jusqu’à la table, ce qui n’était pas simple à une main, et l’y attachait. Ainsi, il ne pourrait pas donner l’alarme directement.
Je me tournais alors vers le garçon. Vu avec quelle force il avait serré la princesse, je ne lui fis pas l’affront de lui demander s’il se sentait capable de marcher. Je lui fis simplement signe de nous suivre en silence. Le signe s’adressa également à Laena.
Je sortis de la pièce en vérifiant bien qu’il n’avait pas d’autres soldats dans les parages.
Les prisonniers nous appelaient de plus belle en nous voyant repasser avec le garçon.
De cris d’alerte se firent entendre dans le fond des cachots. Le garde était plutôt résistant pour être déjà réveillé… Nous arrivâmes enfin à la porte que j’ouvris sans attendre, mais avec un minimum de discrétion. Personne en vue, une fois d plus. Je refermais la porte et me tournais à nouveau vers le garçon.

« Comment t’appelles-tu ? »

Il hésita un moment avant de me répondre d’une petite voix.

« Luka… »

Je restais figé un court instant, mais je n’allais pas m’attarder sur le fait qu’il porte le même nom que moi quand même. Il devait y avoir plus d’un Lucas dans ce monde...

« Luka…sais-tu comment ils t’on amener ici ? »
Nouvelle hésitation.

« Ils m’ont trainé…dans des couloirs. »

Je fus soulagé par sa réponse. S’il s’en souvenait, c’est qu’il était conscient, et qu’il pouvait donc nous aider.

« Saurais-tu nous guider dans les sens inverse ? »

C’était beaucoup lui demander vu son état, et je me doutais bien qu’il n’était pas au meilleur de sa forme lorsqu’il fut trainé ici, mais je pouvais espérer…
Pourtant, il me répondit par un petit signe affirmatif de la tête.
Je souris et rouvrit la porte. Je sortis le premier et fis signe aux deux autres de me suivre. Une fois dans le couloir, j’attendais que Luka nous montre par où aller. Il sembla réfléchir un moment avant de nous montrer un chemin sur notre gauche. Chemin que je suivis sans trop d’hésitation. De toute façon, nous n’avions pas trop le choix. Nous ne pouvions pas rester sur place, alors autant lui faire confiance.
Une fois encore, nous ne croisions personne. Ce n’était pas plus mal, mais de plus en plus inquiétant.
Luka souffrait de ses blessures, mais il ne bronchait pas tellement. Je me mis à coter de lui et lui souris de façon rassurante.

« Quand nous serrons sortit d’ici, tu recevras les meilleurs soins. En attendant, n’hésite pas à le dire si ca ne va pas. »

C’était une façon de me rassurer également. Ce garçon était une raison de plus de sortir de ce château maudit sein et sauf. Et j’espérais vraiment que nous y arriverions.

Lucas ne tarda pas à nous rappeler à l'ordre en nous faisant signe de nous dépêcher de partir. Le jeune garçon me relâcha -enfin- et nous suivîmes tous les deux Lucas au travers du précédent couloir, bordé de cellules. Cela me faisait horriblement mal au coeur d'être obligée de les laisser ici, mais nous ne pouvions pas tous les libérer...

Une fois sortis de cet endroit assez indécent, Lucas se permit de demander le prénom de ... Luka ! J'en fus assez surprise, car, à vrai dire, ce prénom n'était pas très répandu dans nos contrées. Mais cela importait peu. Le plus important était qu'il allait sans doute pouvoir nous sortir de là, ce jeune garçon !! Il avait été emmené ici par les couloirs, donc il pourrait peut-être reconnaître le chemin de la sortie, avec un peu de chance !!

Nous le suivîmes dans ce labyrinthe, empruntant des couloirs toujours aussi inconnus. Mais ces couloirs menaient forcément à la sortie, si Luka nous l'assurait !! Il ne pouvait en être autrement, d'après moi !

"Par ici, dépêchez-vous !"

Il nous pressait de plus en plus pour que nous avançassions plus vite ! Et nous ne croisions personne, ce qui avait le don de nous mettre à cran, car cela était toujours aussi étrange !
Nous arrivâmes devant une porte légèrement entre-ouverte, d'où s'élevaient plusieurs voix pour l'instant indistinctes. Je me stoppai aussitôt, ne voulant pas faire trop de bruit. Luka m'avait devancé, et il s'approcha à pas de loups de l'ouverture, y glissant un oeil avisé. Je crus déceler un léger sourire, furtif, aussitôt ravalé mûrir sur ses lèvres...

Nous suivions Luka un bon moment dans les couloirs. Au fur et à mesure que nous avancions, il semblait être plus sure de lui. Après un long moment à tourner dans ce qui ressemblait maintenant à un labyrinthe, nous finîmes par arrivé à une porte entre ouverte. Nous pouvions entendre des voix de l’autre coter de celle-ci, mais je n’arrivais pas à distinguer exactement ce qu’elles se disaient. Je voulu faire demi-tour, mais Luka s’était déjà dirigé à pas feutré de la porte afin d’y jeter un coup d’œil. Je lui fis un signe discret pour qu’il arrête tout de suite et que nous quittions ce couloir au plus vite avant d’être repéré. Pendant un bref instant, je crus le voire sourire. Mais je me dis que je devais avoir rêvé. Je commençais à m’impatienter, et je me dirigeais vers lui pour le tirer légèrement. Je n’osais pas l’attraper trop fort, de peur de lui faire mal, mais il résista. De peur qu’il fasse du bruit, je le lâchais et le regardais sans comprendre.

« Il faut y aller ! »

J’avais murmuré de façon à ce qu’il soit le seul à entendre, et encore. Je me tournais vers Laena, lui faisant signe de se tenir prête à partir d’un moment à l’autre. Si Luka ne se décidait pas, on partirait sans lui. Ce garçon réagissait de façon bizarre, et cela commençait à m’inquiéter.
Pourquoi restait-il là sans bouger ? J’étais quand même intrigué… mais il ne valait surement mieux pas le savoir, et surtout, nous n’avions pas le temps. Je commençais à m’éloigner,
Faisant signe à la princesse de me suivre. Nous verrions bien si cela le déciderais à suivre ou pas.

Cependant, même si Lucas en avait décidé ainsi, il était hors de question pour moi de l'abandonner ici ! Même s'il me tirait pas la main pour m'inciter à le suivre, même si c'était la meilleure solution, je ne pouvais m'empêcher de vouloir emmener le jeune homme avec nous. Je me débattis pour que Lucas me lâche et il ne put faire autrement, si bien que je me précicpitai un peu trop brusquement vers Luka. Il me rattrapa de justesse, mais dans un grand vacarme, la porte s'étant ouverte en grand. Nous restâmes tous les deux pétrifiés dans le même état que lorsqu'elle s'était ouverte, lui me maintenant pour ne pas que je tombe et moi, à moitié penchée, en déséquilibre. Je venais encore de faire une bêtise...

Tu arrives juste à l'heure, Luka.

L'officier qui venait de laisser entendre sa voix semblait calme et familier envers le jeune homme. Je me remis en équilibre sur mes deux pieds, mais, à mon plus grand étonnement, Luka ne me lâcha pas pour autant. Je lui jetai un regard décontenancé, rempli d'interrogations.

C'était facile, après tout ! Juste deux gamins à ramener ici, pourquoi voudriez-vous que je sois en retard ? répliqua Luka, finissant de me déconcerter. Il nous avait trahis, directement menés jusqu'à la salle des gardes royaux. En faisait-il partie lui aussi ?

Mais enfin... que ... ?

Je n'arrivais pas à formuler une question, ne sachant même pas quoi dire.

Bon, nous pouvons commencer alors. Enfin, dés que tu auras repris ton apparence et que nos deux invités se seront donné la peine d'entrer et de s'installer autour de la table. Il reste justement deux places libres...

Celui qui semblait être le plus haut gradé désigna deux sièges tout à fait banals, mais pourvus de lanières de cuir aux accoudoirs, ainsi qu'aux pieds et même à la taille. Avec ça, il était certain que la personne installée sur ce siège ne pourrait plus effectuer un seul mouvement.

Une légère secousse parcourut Luka et, en quelques secondes, il avait repris son apparence. Il avait pris une bonne dizaine de centimètres, quelques muscles en plus, un visage qui lui donnait une vingtaine d'années, et une force tout de suite plus visible. D'ailleurs sa poigne devint pareille au fer et l'étau se ressera autour de mon bras et de ma taille.

Allez, venez princesse.

Je fus étonnée, après tout cela, de la douceur avec laquelle il m'amena jusqu'au premier siège. Après une hésitation, je m'y assis avec réticence. Il crut bon de repartir en direction de Lucas, me laissant libre de tout mouvement, ce qui me soulageait, bien que je sois extrêmement mal à l'aise à l'instant, dans cet endroit.

A votre tour ! Vous y allez tout seul ou nous devrons vous forcer la main ?

Alors que j’essayais d’emmener la princesse, celle-ci se débâtit un peu pour que je la lâche.
Surpris, je lâchais prise et Laena fût précipitée vers le jeune homme, toujours prêt de la porte.
Sous le coup, la dite porte s’ouvrit, laissant en vue Luka qui maintenait la princesse, et moi juste derrière qui avais essayé de la rattrapée également. Le tableau aurait pu être amusant en d’autres circonstances…
Nous nous retrouvions donc face aux gardes royaux, qui semblaient nous attendre avec impatience. Mon mauvais pressentiment c’était avérer exacte, Luka nous avait trahit, et pas qu’un peu. En tout cas, ils étaient bien informés sur nous. Ils se doutaient que nous ne pourrions pas résister face à la « souffrance » d’un enfant.
Rageur d’avoir été ainsi berné, je jetais un regard noir à Luka qui avait repris son apparence.
Je voulu lui faire lâcher Laena, mais il l’entraina vers une des deux chaises qui nous étaient apparemment destinées.
Il revint ensuite vers moi en me demandant si je le suivais de mon plein gré ou pas. Etant encore affaiblis, et surtout ne voulant pas laisser la princesse ici, je le suivis sans broncher, en prenant sur moi pour ne pas lui mettre un poing en pleine figure.
J’allais donc m’asseoir à côté de Laena, face à l’officier. Je serrais les dents et le fusillais du regard. J’avais une fois plus été piégé, et de la façon la plus idiote qui soit. Après être sur de contrôler ma voix, je me permis une question.

« Et maintenant, vous comptez faire quoi ? »

J’hésitais entre deux propositions. Soit ils nous renvoient dans la chambre, et ils nous laissent y pourrir un moment, ou du moins moi, soit ils nous envoient Jo, et on est mal…surtout moi.
J’essayais de me concentrer pour récupérer au plus vite mon énergie, mais cela n’était pas chose facile, et je savais que je n’étais de toute façon pas de taille face au prince.
Je tournais la tête vers Laena. Je n’étais vraiment bon à rien en ce moment… Je m’excusais silencieusement de cette nouvelle bêtise, et je redoutais les fureurs de Jo contre elle. En tout cas, il ne la toucherait pas tant que je serais là. Et je comptais bien lutter contre ses tours de passe-passe.

Lucas vint s'installer à côté de moi. Mais Luka ne tarda pas à venir attacher les lanières autour de ses poignets. "Par sécurité", selon lui. Bien entendu, le premier ne se gêna pas pour poser une question qui, ma foi, n'était pas inutile. Je tournai la tête vers lui, et il fit de même quelques instants plus tard, semblant s'excuser de la situation. Mais après tout, il avait été raisonnable, tandis que moi j'avais été tout le contraire...

Luka s'installa à gauche de la table, et la dizaine de gardes royals présents (environ le tier ou le quart de leur nombre total, mais ceux dans cette pièce étaient les plus hauts gradés, en excluant Nicolas qui n'était pas là) se tourna vers le "chef". Ce dernier ne fit même pas attention à l'intervention de Lucas.

Bien bien, commençons. Comme vous le savez, nous sommes ici afin de parler de la sécurité pour la semaine prochaine. Il faudra être très attentifs. Vous savez très bien que si nous négligeons ne serait-ce qu'un infime détail, nous sommes tous promis à un châtiment que nous aurons, hélas, bien mérité.

Il fit apparaître des pierres précieuses en face de chaque soldat présent. Ces derniers s'empressèrent de s'en saisir et de les faire disparaitre, assimilant les données qu'elles contenaient. Il y eut des hochements de tête entendus, de légères approuvations verbales, et des silences qui en disaient long.

Vous avez vos tâches, maintenant je dois vous dire en quoi elles consisteront. Däeron, tu auras les portes sud, avec Jiean et Playton. Mioso, tu seras accompagné de Ranil et Methia, pour les portes nord...

Il continua ainsi durant un long moment, allouant des autres gardes aux grades qui nous entouraient. J'avouais avoir du mal à comprendre tant ce que nous faisions ici que ce qu'ils se disaient. A quoi rimait tout cela ?

Luka ne tarda pas à venir m’immobiliser les bras. Je serrais les dents lorsqu’il serra la lanière de mon bras déboité, mais ne laissais rien paraître de la douleur. Elle s’atténuait fortement, ce qui était plutôt une bonne chose. Le chef ignora complètement ma question et commença à distribuer des instructions auxquelles je n’y comprenais rien.
Cela dura un bon moment durant lequel nous étions apparemment invisibles. En effet, ils ne nous accordaient plus la moindre attention. J’en profitais pour tenter de desserrer discrètement mes liens tout en les écoutant attentivement. Mais de quoi parlaient-ils à la fin ? Et pourquoi étions-nous ici ?
Après de longue minute à écouter les ordres que le chef donnait sans se soucier de nous, je fini par comprendre de quoi ils parlaient. Enfin,…j’espérerais me tromper.
Je regardais le chef, horrifier. Ils ne comptaient quand même pas attaquer la Cité ?!
Cette idée me glaça le sang. Si c’était le cas, j’y étais pour beaucoup…
Des images me revinrent à l’esprit. Jonathan avait fait en sorte de me soutirer le plus d’informations possible concernant la Cité et le palais. Je serrais les poings et fusillais Luka du regard. Celui-ci semblait amuser par la situation. Je me tournais à nouveau vers Laena et lui murmurais quelques mots de façon à ce que les gardes ne nous entendent pas.

« Nous devons absolument sortir d’ici le plus vite possible. »

Evidement, c’était plus facile à dire qu’à faire. Mais faute de pouvoir sortir, nous devions au moins prévenir le roi ou qui que se soit d’autre de l’attaque imminente qui se préparait.
Je n’étais sur de rien, et j’espérais que mon état me rende paranoïaque et qu’ils parlaient de tout à fait autre chose. Mais j’avais un mauvais pressentiment. Il fallait que j’en aille le cœur net. Je tirais encore un peu sur les lanières, qui ne bougeaient pas beaucoup, avant de reprendre la parole.

« Dites, si on est de trop n’hésiter pas à le dire surtout. »

C’était évidement très sarcastique, mais je commençais à ne plus tenir en place, et leur indifférence envers nous était des plus déconcertantes, en sachant que c’était eux qui nous avaient fait venir jusqu’ici… Je voulais savoir pourquoi, et surtout, savoir si j’avais vu juste ou non.

Sortir d'ici ? Bien sûr que je le savais, que nous devions sortir d'ici ! Mais par contre, ce que je ne savais absolument pas, c'était comment nous pourrions nous y prendre pour y parvenir. Je ne pus que lui rendre un regard désolé, car je ne savais absolument pas quoi faire...

A sa remarque, tous se retournèrent vers nous, leurs yeux fixés sur Lucas. Ils restèrent silencieux durant un instant, un froid ayant envahi la pièce richement décorée. Le chef, Bastian, lui jeta un regard noir, puis appuyé, avant d'avoir un sourire en coin et de se tourner à nouveau vers ses camarades.

Non, j'allais en venir à vous. Vous aurez un rôle très particulier...

Ils se jetèrent tous des regards entendus entre eux, nous ignorant une nouvelle foi. Puis, Bastian vint se placer derrière Lucas et posa ses mains sur le dossier de la chaise, frôlant le visage du jeune homme de ses mains gantées de cuir. Il se pencha pour lui murmurer quelques mots à l'oreille :

Vous n'êtes pas réellement indispensable selon moi, mais mon avis ne compte pas.

Personne d'autre n'aurait pu entendre ce qu'il avait dit, même pas moi qui était pourtant relativement proche de Lucas. Mais les autres gardes savaient de quoi il retournait.
Il se redressa et revint à sa place, reprenant contenance. Il jeta un oeil à la pendule qui était en face de lui et hocha la tête.

Bien, il ne reste plus que quelques détails à régler. Veillons à être prêts dans deux heures, pour une dernière vérification.

Laena répondit à ma remarque par un regard désolé, signifiant ainsi qu’elle n’avait pas plus d’idées que moi pour sortir d’ici. Evidement, je m’en doutais pas mal.
A ma seconde remarque, adressée aux gardes cette fois, un silence de plomb s’installa pendant un moment. Je sentais les regards pesés sur moi, et le chef sembla vexé par mon intervention. Enfin,…un sourire apparu bien vite sur son visage, et il s’adressa à nous, daignant enfin me répondre.
Mais ses paroles ne firent que me déconcerter encore plus. En quoi pourrions leur être utile ?
Cela ne laissait prévoir rien de bon…
Le chef vint alors se placer derrière moi. Je gardais les yeux rivé sur le mur qui me faisait face, ne voulant pas savoir ce qu’il comptait faire. Je sentis alors son souffle près de mon oreille, et il me murmura quelques mots qui me figèrent un moment. Le garde retourna ensuite à sa place, comme si de rien n’était, et repris ses directives.
Que voulait-il dire par « un rôle important » ? Et surtout, en quoi avais-je de l’importance pour eux ?
Il me fallu un moment avant de reprendre mes esprits. Je fusillais le chef du regard.
Deux heures…pour faire quoi ?

« Serais-ce trop demander d’avoir quelques explications ? Puisque, apparemment, nous avons un rôle « important », la moindre des choses serait de nous mettre au courant de vos projets il me semble. »

J’espérais obtenir plus d’information, mais j’avais comme un doute sur les chances d’avoir une réponse concluante. Mais bon, ca ne coutait rien d’essayer…quoi que

Je comprenais de moins en moins ce qu'il se passait sous mes yeux. Qu'était-ce donc que ces secrets ?!? Ils pourraient au moins nous expliquer un peu plus ce qui allait se dérouler... Mais non, ils ne semblaient pas enclins à nous mettre au courant. Pourtant, selon eux, nous jouerions un rôle important dans l'affaire. Enfin, si j'avais bien compris, c'était surtout le cas de Lucas. Bastian ne s'était pas adressé à nous deux, mais à lui seul. Que mijotait-il ? Etait-ce dangereux ?

Bastian, après la nouvelle question de Lucas, eut un léger signe de tête en direction de Luka. Ce dernier s'approcha alors de moi en me prenant le bras -doucement, tout de même- afin de me faire lever. Je restai cependant assise, prostrée.

Qu'y a-t-il ? Que se passe-t-il ?

J'ai bien peur qu'il soit l'heure pour vous de nous quitter, princesse. Il y a encore beaucoup à faire, et ce n'est plus à nous de nous occuper de vous. Luka va se charger de vous emmener là où est réellement votre place en ce moment. Ou tout du moins fera-t-il une partie du chemin avec vous, car Nicolas devrait bientôt arriver. Après tout, il est votre garde du corps officiel !

Je ne bougeai cependant pas plus, ayant vraiment beaucoup de mal à comprendre où il voulait en venir. Luka fut plus pressant, il m'obligea bientôt à me mettre debout, ayant recourt à une certaine violence pour y parvenir.

Désolé, mais je dois vous y conduire.

Il était nettement perceptible, au son de sa voix, qu'il n'était qu'à moitié désolé de m'avoir presque déboité le bras par sa conduite. Je fus debout malgré moi, le bras en compote durant quelques instants. Je n'avais pu m'empêcher de faire la grimace lorsqu'il avait tiré.

Mais où allez-vous m'emmener ? Que va-t-il se passer ? Je ne comprends rien !

Vous comprendrez bien assez tôt, ne vous en faites pas...

Une fois encore, le chef ne répondit pas à ma question. A la place, il adressa un signe de tête à Luka, qui se saisit du bras de la princesse sans attendre.
Bastian repris la parole en s’adressant à Laena, lui disant qu’elle serait amenée là où elle devait-être. Lorsqu’il prononça le nom de Nicolas, je ne pu me retenir réagir. Evidement, les lanières me retinrent sur la chaise…Garde du corps, tu parle, gardien de prison oui ?!
Laena ne bougea pas. Je la regardais, ne sachant quoi faire. Luka la tenait toujours, et la força à se levée en s’excusant faussement. Je réagis de nouveau, vainement.

« Refait ca et la prochaine fois que je te vois tu es mort ! »

Je lui jetais un regard assassin, me sentant totalement impuissant face à la situation, mais j’avais parlé d’une voix calme.
Laena était complètement perdue. Je me tournais vers Bastian, qui n’était toujours pas disposer à révéler quoi que ce soit, ou du moins, pas en la présence de la princesse.

« J’espère pour vous qu’il ne lui arrivera rien. »

Je me doutais qu’ils la ramenaient à Jonathan, et je redoutais les intentions de celui-ci.
Je me tournais de nouveau vers Laena.

« Méfie-toi de lui… »

Je n’avais pas besoin de préciser contre qui je la mettait en garde, espérant qu’elle ferait attention à ces paroles.
Mon regard se posa à nouveau sur le chef, et je me tus, attendant des explications.

Le garde ne prit pas en compte la menace de Lucas, qui était si insignifiante. Je fis attention à ce qu'il me disait, mais j'avais encore du mal à m'y faire, et il ne lui en faudrait sûrement pas beaucoup pour me faire à nouveau tomber dans le panneau...
J'eus un dernier regard en direction de Lucas avant d'être emmenée par Luka. Nous sortîmes de la pièce et nous dirigeâmes je ne sais où dans ce labyrinthe.

...

-Où suis-je?

J'avais peur. Nicolas m'avait bandé les yeux sitôt ceux-ci ayant croisé son regard impétueux. Je ne savais pas où j'étais, ni ce qu'il s'était passé ensuite. Mais je savais qu'à présent, j'étais seule dans une pièce froide, qui m'effrayait horriblement.

-Pourquoi ne me laisses-tu pas sortir ? Je me sens mal, dans cet endroit.

Ma voix continuait, suppliant une personne qui ne semblait pas vouloir répondre aux questions. Un silence, seul, laissait place à ses interrogations.

-J'ai peur...

Une présence, toute proche. J'arrachai mon bandeau, me rendant compte que cela était à présent possible. Et, en effet, je me trouvais seule entre quatre murs. Cet endroit me semblait connu. C'était un lieu luxueux, décoré pour une occasion qui m'échappait encore...

-Laisse-moi sortir, s'il te plait.

Mais par-delà le mur, personne ne me répondait.
J'avançai vers la porte, ne voyant qu'elle. Je tournai la poignée, mais elle ne s'ouvrit pas. Je tirai dessus, puis poussai, mais rien n'y faisait.

-Je t'en prie ! Je déteste être enfermée ! Ouvre-moi.

Je sentais les larmes me piquer les yeux, prêtes à se mouvoir sur mon visage d'un instant à l'autre. J'en avais assez d'être sans cesse consignée, ces temps-ci. Il ne me laissait plus sortir, je ne pouvais plus quitter ma chambre, excepté lorsqu'il était avec moi. Je ne l'avais plus vu depuis notre altercation avec lui, Lucas et moi, mais je le sentais, je ressentais sa présence toute proche, juste de l'autre côté de cette porte. Qu'attendait-il pour l'ouvrir ? Ce n'était vraiment pas gentil de sa part !

-Jo, suppliai-je encore. Laisse-moi sortir...

Je lâchai la poignée de la porte et me laissai glisser contre le mur juste à côté. Je repliai mes genoux contre moi et les entourai de mes bras. J'enfouis ma tête dans ma nouvelle robe d'un blanc sans faille, n'y ayant même pas encore prêté attention. Je sanglotais silencieusement dans cette pénombre.
Un imperceptible mouvement, derrière la porte, ne me fit même plus tourner la tête. Il partait, me laissant encore plus seule ici. La peur s'était insinuée en moi, me rongeant. Qu'allait-il se passer ? Pourquoi personne ne me répondait ?

J'étais encore secouée par la tristesse de la perte de ma mère, si peu de temps plus tôt. Je n'en revenais toujours pas d'avoir fait cela, cette idée m'était toujours impensable ! Moi ? La tuer ? Comment l'aurais-je pu ? Je n'aurais jamais fait de mal à une mouche ! Jamais !!

D'ici, je n'entendais rien, j'étais complètement isolée du reste du monde. Cette pièce m'était inconnue, cet endroit m'était inconnu, l'homme qui se trouvait derrière la porte un peu plus tôt me semblait lui-même inconnu... Il n'était pas le Jo que j'avais côtoyé étant petite ! Ce n'était pas lui. Ce n'était plus lui. Il avait tellement changé, d'un jour à l'autre. Il était pourtant adorable avec moi, avant le soir de notre anniversaire. Ce cadeau empoisonné auquel il m'avait poussée m'avait totalement fait perdre pieds. Qui était-il ? Je ne le reconnaissais plus ! Après ce soir-là, il m'avait laissée un peu seule, seulement un ou deux jours. Ensuite, il était venu me voir dans la chambre où il m'avait enfermée pour éviter que je ne m'enfuisse. Je l'avais repoussé violemment, je n'étais pas prête à lui pardonner cela ! Il avait fini par insister, m'inciter à oublier, à tourner la page. Mais je ne voulais pas, je ne pouvais pas. J'étais une assassin, une meurtrière, rien de plus. J'avais tué ma mère devant tant de gens. Ils étaient tous témoins ! Ils étaient tous là et personne n'avait rien fait pour m'en empêcher.
Leldi était venu me délivrer alors qu'il était très certainement sur le point de... Je n'osai même pas y repenser !

Je ne sus jamais ce qu'il s'était exactement passé le jour de mon anniversaire, seulement les images qui me revenaient. Elle était devant moi, me suppliant de le faire tandis que je me savais incapable d'en arriver là. Jo m'y incitait avec cœur, je perçais la haine contenue dans ses paroles. Et puis, le noir absolu. Plus rien. Une douleur atroce revint à mes oreilles en y repensant. J'avais ouvert les yeux pour découvrir ma mère inconsciente sur le sol, couverte de sang. Je tenais dans ma main l'arme qui l'avait transpercée. C'était bel et bien moi qui l’avais tuée.

...

Les gardes se tournèrent vers Lucas, d'un air presque solennel. Le silence s'installa une nouvelle fois dans la pièce, avant d'être brisé par Bastian, comme chaque fois.

Eh bien, je vais pouvoir vous révéler en quoi vous nous serez encore utile, même si, d'après moi, cette raison n'est que pure pacotille.
Son altesse le prince Jonathan préfère avoir un otage, quelque chose qui déciderait la princesse si jamais elle hésitait à franchir le pas. Selon moi, il n'a pas besoin de faire pression de cette façon sur elle. Il y en a mille et une autre qui ne requiert point votre participation. Nous pourrions vous tuer, voire vous envoyer au Champ plutôt que de vous garder ici en à peu près bon état. Enfin, ce sont les ordres, nous ne pouvons que les exécuter. Donc, vous serez notre "Jocker" en cas de besoin, c'est là votre rôle. Vous agirez pour le royaume, pour sa continuité ! Vous pouvez être fier de l'honneur que vous avez de servir ainsi Monär et son prince ! Vous mériteriez plutôt l'humiliation de la mort...

Ayant terminé son discours, il s'installa confortablement sur son fauteuil et ouvrit un parchemin. Il le lut en silence tandis que les autres gardes, après avoir souri, échangèrent des réflexions exacerbées.

Luka fini par emmener Laena. Le silence retomba dans la pièce, brisé par quelques murmures à peines audibles entre les gardes.
Bastian fini par reprendre la parole, se décidant enfin à me donner des explications sur ce qu’il se passait. Je l’écoutais jusqu’au bout, immobile, cherchant à comprendre de quoi il parlait.
Une fois encore, j’étais pris comme otage pour forcer Laena. Mais la forcer à quoi ?
Au moins, j’avais apparemment vu tout faut, et cela ma rassura légèrement. Cela ne concernait que la princesse et moi, et non la Cité.
Bastian semblait déçu par le fait qu’il faille me garder en vie, et en à peu près bonne état, selon ses paroles. Pour lui, s’était un honneur que l’on me faisait de pouvoir servir ainsi Monär. Je ne pu m’empêcher de sourire ironiquement. Je préférais de loin la mort plutôt que d’être utile à ce monstre de Jonathan. Surtout si c’était pour forcer la main de la princesse pour quoi que ce soit.
Une fois qu’il eu fini de m’expliquer mon rôle, bien que cela ne m’ai pas beaucoup plus éclairé, le chef s’installa dans son fauteuil et commença à lire en silence, m’ignorant une fois de plus. Les autres reprirent leurs petites discutions sans plus se soucier de moi. Rageur, je tirais encore sur mes liens, ne sentant plus du tout la douleur cette fois. Si j’avais bien compris l’affaire, j’avais encore un peu de temps devant moi pour me sortir d’ici et retrouver Laena.
Mais j’étais encore bien faible, et je n’avais aucunes idées de la façon d’on je pouvais m’y prendre. Une fois encore, la princesse serait forcée par ma faute à faire une chose dont elle n’aurait apparemment pas envie. Enfin, ce n’était pas l’avis du garde, mais celui de Jo était suffisant pour ma faire comprendre qu’il préparait un gros coup. Si je n’étais pas encore mort, c’est qu’il aurait surement besoin de moi. Il préparait toutes les possibilités possible afin d’être sur d’obtenir ce qu’il voulait. Il fallait au moins lui reconnaître ca, il était d’une intelligence macabre…
Je commençais vraiment à en avoir assez. Combien de temps comptaient-t-ils me garder ici ? Quoi que ce fût bien plus confortable que les cachots, mais ca, ce n’était pas difficile à faire.
Désespérant d’obtenir plus d’information sur leurs intentions exactes, je fermais les yeux en soupirant. Une image s’imposa aussitôt à moi, et je ne tardais pas à les rouvrir. Décidément, j’étais bon pour être hanté un bon moment… Je regardais à nouveau le garde, hésitant un instant avant de prendre la parole.

« Que savez-vous sur la mort de la reine ? »

La question était simple, et il me permettrait peut-être de mettre les choses aux claires, au moins pour cela. Je laissais le sujet actuel de côté pour l’instant, sachant que je n’en saurais pas plus avant le moment venu

Bastian le fixa longuement, hésitant tout à coup. Il ne savait pas s'il devait lui révéler quelque chose. Jonathan n'avait pas parlé de ça, il n'avait donné aucune instruction à ce sujet ! Et si jamais l'un d'eux faisait quelque chose de travers, il était bon pour la casse, ainsi que Bastian qui en était responsable. Ce dernier affichait un air grave.

Elle est morte il y a à peu près deux mois, lors de l'anniversaire de la princesse et du prince, et de leur fiançaille par la même occasion. C'était une belle fête ! J'y ai assisté en tant que garde, mais j'ai vu la scène. Elle a été assez bête pour s'offusquer du fait qu'il ne l'avait pas consulté avant de faire l'annonce devant tout le monde. Alors il a décidé d'avancer l'heure du spectacle. La reine déchue de la Cité est entrée. Elle était déjà vidée de son énergie et à moitié morte. Elle avait déjà plus d'un pied dans la tombe...

Il s'arrêta et consulta l'entourage. Ils firent tous un signe d'acquiescement de la tête, chacun leur tour, d'un air entendu. Il reprit :

Son altesse a alors demandé à la princesse de choisir : soit elle tuait sa mère, soit il la tuait elle. Elle a voulu se rebeller mais n'a pas réussi. Après tout, elle était seule contre tous... Alors elle a obéi, elle a assassiné sa génitrice. C'était la seule solution possible, la seule qu'elle devait choisir ! Il faut tuer tous ceux qui s'opposent au prince et à Monär ! Seuls les fidèles et les purs peuvent prétendre vivre et servir le prince !!

Le garde hésita un moment avant de me répondre. Mais il fini par se lancer dans ses expliquations que j'écoutais attentivement d'abord, et bouche-bé ensuite. Plus il avancait dans son histoire, plus je me crispais sur la chaise. C'était donc vrai. Cela expliquait le comportement étrange de Laena à son retour, et cela confirma mes craintes duent aux images que m'avait montrés Jonathan.
Je ne pouvais pas y croire. La seule expliquation qui me semblait plausible était qu'il l'avait forcée par un quelconque moyen. Ca ne pouvait-être que ca. Ce salaud l'avait utilisé.
Je gardais le silence longtemps après qu'il ait fini. Les gardes semblaient s'amuser de la situation et Bastian arborait un air fière.
Ils me dégoutaient. Je pestais contre Jo, me persuadant qu'il n'avait pu qu'user d'un lâche stratagème contre Laena et la reine.
Je basculais la tête en arrière, fixant ainsi le plafond. Je ne pouvais rien faire d'autre qu'attendre, et cela était plus que frustrant. Le temps semblait sécouler au ralentit, bien que je ne sache même pas si il faisait jour ou nuit... Les gardes étaient retourner à leurs occupations, et Bastian me surveillait du coin de l'oeil. Je me redressais en soupirant, les poings toujours serrés, tentant de rester calme.
Je me sentais horriblement impuissant depuis un moment. Les évènements méchapaient totalements, tournants dangereusement à l'avantage pour Jo. Après de longues minutes de silences, du moins, c'est ce qu'il me semblait, je me décidais à rompre le silence. Me perdre ainsi dans mes pensées ne changerait rien à la situation, sinon à me faire du mal. En parlant de ca, je ne sentait presque plus mes blessure, et mon bras déboité ne me faisait plus mal. Avec un peu de chance, il s'était remis tout seul...si c'était possible.

"Vous comptez me garder combien de temps ainsi?"

Il m'avais explqier plus ou moins ce qu'ils comptaient faire de moi, mais il n'avait pas préciser ce qu'ils comptaient faire dans l'imédiat. Bien que je ne préferais pas savoir, c'était toujours mieux que le silence...

Bastian et les autres gardes étaient repartis à leurs occupations. Aucun d'eux mis à part le chef ne se préoccupait plus de Lucas. Ce dernier était toujours attaché au siège et n'avait aucun moyen pour s'enfuir.

Les gardes ouvraient des cartes, discutaient des stratégies et des meilleurs emplacements, en fonction de leurs attributions respectives. Mais seuls eux se comprenaient à présent. Ils parlaient vite et de manière circonscise, de manière à ce que leur invité surprise ne puisse pas comprendre de quoi il était question. Ils n'étaient pas très chauds à l'idée de devoir le garder ici encore un bon moment, mais il fallait faire avec !

D'ailleurs, Lucas ne tarda pas à réapparaître en posant une question tout à fait stupide. L'un des gardes se tourna vers lui, agacé d'être ainsi interrompu par un pauvre prisonnier !

On préfèrerait tous que tu ne sois pas ici, mais on n'a pas le choix ! Alors maintenant tu te tais et tu nous laisses travailler, on doit finir ça dans les temps !!

Il lui jeta un regard meurtrier avant de revenir à son occupation principale.

L'un des gardes me répondit froidement, l'air agacé par mon intervention dans leurs conversations auxquels je ne comprenais absolument rien.
Il me jeta un regard assassin qui me fit sourire, tout en me demandant de garder le silence.

« Je m’excuse de vous déranger ainsi. Demander si gentiment, je ne peux que me taire. »

Evidement, c’était du pur sarcasme. Qu’ils finissent en retard m’arrangerait bien, même si je n’avais toujours aucune précision sur les évènements à venir, cela ne pourrait être que bénéfique pour nous.
Sachant que je risquais gros, je me décidais à les titiller un peu. Avec de la chance, ils m’éclaireraient peut-être un peu plus.

« Mais dites-moi, cela doit-être un évènement important pour que vous preniez autant de précautions à le préparer… »

Je me savais un minimum protéger par le fait que Jo aurait éventuellement besoin de moi, mais je redoutais jusqu’où il leur avait donné quartier libre… Mais tempi, rester là à ne rien faire allait finir par rendre dingue. Et je ne voyais pas d’autre moyen de les faire parler sinon d’insister…